Brutalité, délicatesse et entraînement
Publié le 8 Février 2014
Maître Kuroda dit de l’entraînement aux arts martiaux, qu’il doit aussi amener les élèves à développer le comportement d’un gentleman… sans pour autant jamais donner d’autres indications que techniques au cours d’une leçon.
Maître Tamura lui, était plutôt avare d’explications. Il préférait montrer l’exemple et faire ressentir la technique. Mais il lui arrivait parfois à l’issue d’un stage, de dire quelques mots à propos de l’Aikido et de l’esprit qu’il convient de développer en tant que pratiquant.
Je crois pour ma part que pour tous deux, une attitude juste est la conséquence d’un entraînement correct.
Maître Tamura m’a fait découvrir un monde dans lequel la force et la brutalité n’avaient plus aucun sens. Sans lui, soit je serais devenu une brute, soit j’aurais cessé d’étudier les arts martiaux.
Maître Kuroda lui, m’a fait découvrir toute l’étendue de mon ignorance, il m’a montré que ma technique ne fonctionnait pas, que dans le monde des samurais, je n’aurai pas été capable de bouger un seul doigt.
C’est grâce à ces Maîtres que j’ai pu cesser de me bercer d’illusions sur mon propre niveau et commencer à m’entraîner de façon correcte mais j’ai surtout appris que rien ne pouvait remplacer l’entraînement et qu’il m’en faudrait encore beaucoup pour atteindre ne serait-ce qu’un début de satisfaction dans ce domaine.
Kuroda Tetsuzan
Il est pourtant tellement habituel de rencontrer des pratiquants satisfaits, affables dans la vie courante discourir sur l’harmonie et l’utilisation de la force de l’adversaire qui, une fois sur le tatami, se transforment en brutes épaisses aux techniques douloureuses. Je ne peux m’empêcher de penser que ces personnes, parfois sincères, récitent ces formules comme des prières dont elles ne comprendront jamais le sens.
Heureusement, nous vivons ici dans un environnement confortable dans lequel les risques de confrontation sont pratiquement nuls. Mais il faut être lucide, faire preuve de clémence quand nos techniques ne fonctionnent qu’avec brutalité est impossible.
Une technique doit fonctionner, sinon ce n’est pas une technique. Une technique qui fonctionne grâce à la force n’est pas une technique, c’est de la force. Une technique qui fonctionne grâce à la souplesse n’est pas une technique, c’est de la souplesse. Une technique doit fonctionner grâce à la technique. Le problème n’est pas de savoir si une technique est susceptible de fonctionner, le problème est parvenir à la faire fonctionner. Si on est incapable de la faire fonctionner, cela ne veut pas dire que la technique ne vaut rien, cela veut uniquement dire que l’on est incapable de la faire fonctionner. Et ce n’est pas parce que c’est difficile qu’il ne faut pas retourner travailler.
Tamura Nobuyoshi
Je ne crois pas qu’il y ait de mauvaises techniques ou de mauvaises disciplines, je crois qu’il y a des personnes qui persévèrent plus que d’autres qui parviennent à faire vivre leurs techniques et d’autres qui n’y parviennent pas.
A travers les heures d’entraînement, de développement de la sensibilité et d’étude du geste juste, le pratiquant se polit et acquiert une lecture des mouvements, des comportements et des situations qui lui permettront d’agir de façon appropriée en toutes circonstances. Un geste brutal ou un comportement indélicat ne sont que la conséquence d’un manque de sensibilité et de précision ce qui revient au même, c’est-à-dire d’un manque d’entraînement.
Et pour combler ses propres faiblesses, il ne suffit pas de citer quelques phrases de Maîtres, il faut s'entraîner.